Emmanuel Macron a signé précipitamment les ordonnances contre le Code du travail, le 23 septembre. Elles avaient été officiellement présentées la veille au Conseil des ministres. Une vingtaine de décrets d’application sont encore nécessaires, ainsi que le vote par le Parlement d’une loi de ratification, qui pourrait intervenir dans la semaine du 20 novembre, selon le porte-parole du gouvernement.
Dans la foulée de la loi El Khomri, les ordonnances dynamitent la « hiérarchie des normes » sur laquelle est fondée le droit du travail depuis 1936. Dans cette « hiérarchie », le Code du travail s’appliquait à tous les travailleurs, dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ou leur branche (secteur d’activité). Dans les branches, les conventions collectives ne pouvaient que rendre plus favorables aux travailleurs les dispositions du Code du travail, et les accords d’entreprises ne pouvaient pas déroger aux conventions collectives ni, bien sûr, au Code du travail. En bref, pour une disposition donnée, c’était toujours la plus favorable qui devait s’appliquer (« principe de faveur »).
Avec les ordonnances, les accords d’entreprise, où le chantage patronal s’exprime le plus férocement, deviennent la source principale du droit. Les branches, que la ministre du Travail a prétendu avoir « renforcées », vont en réalité pouvoir définir certaines dispositions, relatives par exemple au CDD, qui relevaient auparavant du code du travail. Ces dispositions varieront donc d’une branche à l’autre. Les branches pourront aussi généraliser le contrat de chantier (des contrats précaires sans même les garanties attachées au CDD).
Les primes (ancienneté, treizième mois) qui étaient fixées par les branches seront désormais définies au niveau de l’entreprise. Les conventions collectives, sous peine de nullité, ne devront pas « porter une atteinte excessive à la libre concurrence » et devront prévoir des clauses « spécifiques » aux entreprises de moins de cinquante salariés.
Avec la barémisation des dommages et intérêts perçus par les salariés après jugement aux prud’hommes en cas de licenciement abusif, les patrons pourront licencier qui ils veulent au mépris de la loi, en sachant à l’avance au centime près ce que cela leur coûtera. Ils pourront aussi modifier a posteriori le motif du licenciement pour échapper à une condamnation.
La justice ne pourra plus poursuivre une entreprise qui licencie pour motif économique alors même qu’elle réalise des profits à l’étranger.
Avec les « ruptures conventionnelles collectives« , elles pourront licencier sans même mettre en œuvre un plan social. Sous le prétexte des « nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise » (c’est-à-dire dès que le patron le décide !), l’employeur pourra conclure des accords dérogatoires concernant notamment « la durée du travail » et « la rémunération » (… travailler plus pour gagner moins !).
Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, ces accords pourront être conclus sans aucun délégué syndical ! Dans toutes les entreprises, les institutions représentatives du personnel (délégués du personnel, comités d’entreprise, CHSCT) seront toutes fusionnées dans un conseil social économique (CSE), qui pourra muter en un « conseil d’entreprise » ayant capacité à signer des accords en lieu et place des syndicats.
La FSU-Finances se prononce clairement pour le retrait pur et simple de ces ordonnances et l’abrogation de la loi Travail-El Khomri.