Fonction publique : l’intersyndicale claque la porte de la première réunion post-confinement
Les syndicats CGT, FA-FP, FO, FSU et Solidaires ont jugé « inacceptable » que soit abordée la suppression des CHSCT sans « tirer les enseignements » de la crise.
Cinq des neuf syndicats de la fonction publique ont quitté, vendredi 5 juin, la première réunion organisée physiquement après le confinement, jugeant « inacceptable » de discuter de la suppression des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) avant même de « tirer les enseignements de la crise », ont-ils déclaré lors d’une conférence de presse sur place.
Plusieurs réunions sont prévues avant la tenue d’un conseil commun de la fonction publique le 25 juin, pour mettre en œuvre la loi de transformation de la fonction publique, qui prévoit notamment la fusion des CHSCT dans les comités sociaux, unanimement dénoncée par les syndicats.
CGT, FA-FP, FO, FSU et Solidaires soulignent qu’« alors que les CHSCT sont en première ligne pour défendre la santé des personnels, c’est par la suppression de cette institution que la direction de la fonction reprend la négociation».
«Beaucoup plus de dégâts» sans les CHSCT
«On reprend l’agenda comme si de rien n’était. Nous demandons de tirer avant tout les enseignements de la crise, alors que les personnels ont fait la preuve de leur dévouement, particulièrement dans la fonction publique hospitalière », a souligné Jean-Marc Canon, pour la CGT.«Reprendre la négociation par la suppression de cette instance est choquant, inacceptable », pour Hervé Moreau, de la FSU. Christian Grolier (FO) estime qu’« il y aurait eu beaucoup plus de dégâts si les CHSCT n’avaient pas été là pendant l’épidémie ».
Les cinq organisations, qui pèsent 58 % des mandats dans la fonction publique, réclament « un bilan de cette crise » avant toute chose et une « réunion salariale » qui ne se borne pas à des « mesurettes partielles », selon les mots de Pascal Kessler (FA-FP).
Coronavirus : le jour de carence des fonctionnaires ne sera pour l’instant pas suspendu
Les agents publics atteints par le Covid-19 bénéficient du maintien de leur rémunération à partir du deuxième jour d’arrêt maladie seulement.
« A ce stade, pas d’évolution. » La réponse du cabinet d’Olivier Dussopt, secrétaire d’Etat notamment chargé du dossier de la fonction publique, est laconique. Le jour de carence qui s’applique aux fonctionnaires depuis 2018 ne sera pas suspendu le temps de l’épidémie causée par le coronavirus. Les agents publics qui se trouvent en congé maladie du fait du Covid-19 ne bénéficieront du maintien de leur rémunération qu’à partir du deuxième jour d’arrêt.
Cinq syndicats de fonctionnaires (CGT, Fédération autonome, FO, FSU, Solidaires) ont écrit au premier ministre, mardi 17 mars, pour lui demander que l’abrogation de cette « mesure vexatoire » soit incluse dans le projet de loi d’urgence. Mais le texte adopté par le conseil des ministres, mercredi, ne prévoit rien de la sorte.
« C’est une situation absolument invraisemblable, s’agace Jean-Marc Canon, secrétaire général de la CGT-Fonction publique. Je n’arrive pas à comprendre cet entêtement. » Un agent, souligne M. Canon, qui devra rester chez lui pour télétravailler ou garder ses enfants sera payé intégralement. Mais le jour où il tomberait malade du Covid-19, il perdrait une journée de salaire.
Souplesse demandée
Par ailleurs, écrivent les syndicats dans la lettre envoyée à Edouard Philippe, « l’engagement avait été pris devant toutes les organisations », par Olivier Dussopt, de ne pas appliquer le jour de carence. « Ce dernier pourtant est revenu ensuite sur cet engagement à un moment où toute tergiversation n’est plus acceptable, regrettent-ils dans la même missive. Dans une crise sanitaire qui coûtera des milliards à l’économie française, récupérer de l’argent sur le dos de fonctionnaires malades serait très loin des propos du président de la République sur la solidarité et la responsabilité. »
Selon la CGT, le secrétaire d’Etat a promis d’envoyer une circulaire aux employeurs publics pour leur demander de faire preuve de souplesse et de ne pas appliquer le jour de carence pendant l’épidémie. Mais une circulaire « n’a pas force de loi », rappelle Jean-Marc Canon.
C’est ce que confirme Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale : « Ça ne marche pas, les circulaires, explique-t-il. C’est une loi qui a instauré le jour de carence pour les fonctionnaires, c’est elle qui s’impose à nous. »
Mais tout n’est pas perdu. Lors de l’examen, jeudi 19 mars au Sénat, du projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie, un amendement sénatorial devrait proposer de faire du Covid-19 un motif légal d’exception, permettant de ne pas appliquer le jour de carence aux fonctionnaires. « Olivier Dussopt y est favorable, assure une source proche du dossier, mais ce n’est pas le cas de tout le monde au gouvernement. Cet amendement permettra peut-être de faire bouger les choses. »